9/12/2025
Note de lecture, par C. B et P. H
Jenny est une petite fille d’une dizaine d’années… qui veut devenir matelot ! Mais ses grand-parents auprès desquels elle passe de longues vacances au bord de la Baltique n’encouragent pas ce rêve. « Le bleu ne te va pas » dit l’une quand l’autre a déjà affirmé qu’il n’existe pas de « matelote ». Alors ?
Dans la clôture rigide de la RDA, là où l’Europe floute sa ligne de côte septentrionale en îles, presqu’îles et couloirs, où le ciel et la mer, souvent, ne font qu’un, l’imagination de Jenny fait feu de toute observation à hauteur de plage, et pétille de questions. Moments magiques d’un récit d’enfance que la narration à la troisième personne met à distance de toute nostalgie autobiographique. Ils alternent sans prévenir avec d’autres à la première personne, qui introduisent des lieux, des temps, des artistes, d’Eisenstein et son Cuirassé Potemkine à Coney Island, de Claude Cahun et son jeu sur les identités au dirigeable Zeppelin. Une double structure narrative ouvrant le lecteur au plaisir d’un espace d’incertitude que ne détruisent pas, loin de là, les photos qui émaillent le texte. Comme s’il nous appartenait d’éprouver, avec Jenny et sa créatrice, ce besoin irrépressible de respirer, enraciné dans l’insularité première, ce désir d’ailleurs, qu’incarne le matelot et que, sans aucun doute, réincarne l’écriture de la romancière. Quelle expérience de lecture !